17.11.09

3-Et bien sûr, la mienne en suivant...

Le 22 Novembre 2009

Monsieur Le Proviseur du Lycée Joffre,

J’ai lu avec grande attention votre réponse à ma lettre du 3 novembre 2009. Je dois avouer qu’elle me laisse un peu interloqué.
D’abord je ne pensais même pas en recevoir. Une amie enseignante m’avait ainsi prévenue :
« Quant à ton texte, nécessaire et légitime, ne te fais pas d’illusion, il sera balayé d'un revers de main par les profs, qui y verront les états d'âme inintéressants d'un père, qu'ils qualifieront de papa-poule ou de "soixante-huitard" ».
Mais finalement voilà que j’en obtiens une de leur hiérarchie. Et quelle réponse ! Ce n’est pas d’un revers de main qu’il s’agit mais bien plutôt d’une charge au canon (peut être prévisible de la part d’un établissement situé « allée de la Citadelle »).
Et tout est bien là comme prévu ! La réduction au « papa poule », introduction gentille et compassionnelle, immédiatement suivie d’un jugement méprisant sur mes piètres « prétentions » à la compréhension d’un monde dont de toute évidence je ne fais pas partie. Discréditer en quatre lignes condescendantes trois pages d’analyse argumentée me laisse pantois d’admiration…. !
Je vous le concède, l’esprit critique est une denrée rare et vous ne devez pas être habitué à vous y frotter, mais lorsque l’occasion se présente pourquoi ne pas en profiter ? Faire un effort d’écoute, entendre le fond d’une pensée divergente de la sienne mais certainement fondé sur une légitimité, expérimenter la contradiction comme source d’évolution, et peut être ainsi prétendre à s’améliorer. Mais je suis un utopiste, n’est ce pas ?
Et puis, enfin si mes « propos….. n'appelle(nt) de ce fait aucune réponse » pourquoi donc prendre toute cette peine à m’écrire. Quel est donc, alors, son véritable objet? Ne serait ce pas les menaces explicites « de poursuites pénales » susceptibles de calmer mes ardeurs dénonciatrices? Mon nez me démange et me fait parier pour cette hypothèse…
Enfin, Monsieur Le proviseur, dans ce cas là, n’aurait-il pas été plus sage de simplement m’ignorer et de me laisser moisir dans mon ressentiment de père meurtri, pauvre idiot idéaliste ? C’est pourtant bien là, et vous ne pouvez manquer de l’ignorer, la quintessence du mépris et son expression la plus efficace. Et, sachez le, votre tentative d’intimidation m’amuse bien plus qu’elle ne m’effraie. Souhaiteriez-vous vraiment un relais médiatique à ce petit événement provincial ?
D’autant, qu’aujourd’hui, vous venez bien généreusement renforcer (inconsciemment semble-t-il) mon analyse. Surtout en poursuivant par deux « observations » particulièrement savoureuse :

D’abord les « Tables de la Loi » ultime refuge de l’esprit assiégé. Comme si cette « mission administrative» était à même de justifier toute dérive qui peut en découler. C’est tellement vrai que le ministère en a lui-même pris conscience et que le directeur général de l’enseignement supérieur à organisé en 2007 « La Rénovation de la filière littéraire des CPGE » Bulletin Officiel n° 19 du 10 mai 2007 Circulaire N°2007-102 DU 2-5-2007. Je vous invite donc à le relire. Vous y trouverez cette phrase : « La filière littéraire doit donc dans son ensemble gagner en cohérence et en visibilité, tant pour les élèves eux-mêmes, dans le cadre de l’articulation de ces classes au système universitaire LMD, que pour le monde socio-économique qui attend beaucoup des jeunes issus de cette formation ».

Mettre en péril l’équilibre physique et mental de plus de 600 élèves en huit ans pour obtenir 7 admis à l’ENS n’est donc plus vraiment à l’ordre du jour. Et c’est ce qui nous a été dit lors de vos portes ouvertes de l’année dernière (brillamment par Mr Cotte) et nous a convaincus de l’intérêt de cette filière pour Giulia. C’est cette contradiction de fond et uniquement celle là qui m’a amené à réagir car elle concerne un nombre important d’élèves et déborde largement notre petit cas personnel. Mais comme la tentative de suicide d’un élève de LS1 ne semble même pas de nature à vous remettre en question et bien que je n’aie jamais cru que ma lettre y parviendrait j’ai écrit une sorte de pamphlet comme unique trace écrite de ce douloureux épisode.

Ensuite, et pour finir, votre seconde « observation », un modèle d’arrogance perfide. Surtout qu’elle se termine par des vœux de réussite d’une rare hypocrisie au vu de ce qui les précède. Alors pour mémoire : Giulia a été admise à la première session, avant le bac (Son premier vœu étant Joffre). Que signifie 239éme sur 280 alors qu’il n’y a que 80 inscrits en Hypokhâgne ? Et si un élève sur 2 a obtenu la mention TB qu’en est-il de l’autre moitié ? Déjà condamnée ? Ah oui, j’oubliais ! Son prof de Philo, attristé, lui a dit que le départ d’élève comme elle était une perte pour la classe… ! Et, d’autre part, je suis sur que les professeurs et l’administration du lycée Philippe Lamour sauront apprécier à sa juste valeur la haute estime que vous sembler porter à leur établissement.
Une dernière chose, Monsieur Le Proviseur, au sujet de la « violence » de mes propos. Je la trouve bien minime face à celle que subissent les élèves dans vos classes d’hypokhâgne. Mais soyez rassuré, je ne représente bien entendu aucune menace pour vous. Si ce n’est celle de vous avoir un peu dérangé dans vos certitudes béates et consensuelles. Veuillez m’en excuser.
Allez une dernière à méditer pour la route !
Un système imparfait ne se perpétue que par ceux qui savent s’y adapter et verrouillent ainsi toute possibilité d’évolution.
Et puis mes vieux restes d’éducation m’incite à vous présenter mes cordiales salutations même si, de votre côté, il ne vous a pas semblé utile de le faire.
Bernard Bouchault

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